1. Le marché des services de transport ferroviaire de voyageurs en France suscite l’intérêt de nombreuses entreprises ferroviaires alternatives
1.2. Le système ferroviaire français suscite un fort intérêt en raison de nombreux gisements de trafic à exploiter
1.2.1. Depuis 2019, six opérateurs ferroviaires, dont cinq nouveaux, ont notifié à l’Autorité leur intention d’exploiter trente-huit nouveaux services ferroviaires librement organisés et au moins trois opérateurs ferroviaires alternatifs additionnels envisagent de se positionner sur les services conventionnés
L’Autorité a reçu des notifications d’intentions d’exploitations de la part de cinq opérateurs ferroviaires alternatifs dans le cadre de l’ouverture à l’exploitation de services de transport ferroviaire de voyageurs librement organisés à compter de l’horaire de service 2021 (soit à partir du 13 décembre 2020) : FlixTrain (qui a toutefois reporté son intention d’entrée à une date ultérieure), la société Le Train, Railcoop, Trenitalia France (ex-Thello), RENFE Viajeros. Au nombre de trente-huit fin novembre 2021, ces notifications, de la part de nouveaux opérateurs, témoignent de leur intérêt pour le marché français.
SNCF Voyageurs a également notifié à l’ART son intention d’exploiter deux nouveaux services librement organisés sur ligne classique (Paris-Lyon et Paris-Nantes via Saint-Pierre-des-Corps ou Le Mans), dans ce contexte de multiplication des déclarations d’intentions, en dépit de la crise sanitaire.
En outre, courant 2021, un nouvel opérateur ferroviaire potentiel, la start-up Midnight Trains, a indiqué vouloir développer, d’ici 2024, des services de trains de nuit dans le cadre d’un modèle adapté par rapport aux attentes actuelles des voyageurs susceptibles d’utiliser de tels services.
L’arrêt total officiel, depuis le 1er juillet 2021, des services internationaux librement organisés, sur ligne classique, de trains de jour (Paris-Nice-Milan) et de nuit (Paris-Venise), exploités par la société Thello depuis 2010, vient tempérer ce tableau d’ensemble. Toutefois, il convient de préciser que la maison mère de Thello, l’opérateur historique italien Trenitalia, concentre aujourd’hui ses forces en France sur le développement de son offre de services à grande vitesse entre Paris et Milan, via Lyon, proposée depuis la fin de l’année 2021.
L’intégration des acteurs qui ont déclaré leur intérêt pour l’exploitation de services de transport ferroviaire de voyageurs conventionnés fait croître d’au moins trois le nombre de nouveaux entrants potentiels (Arriva, Régionéo [co-entreprise formée par RATP Dev/Getlink] et Transdev), portant à au moins neuf le nombre d’acteurs ayant annoncé leur intérêt pour le marché français.
1.2.2. Un potentiel inexploité du système de transport ferroviaire français pourrait expliquer son attractivité pour le développement de services par de nouveaux entrants
En premier lieu, et de manière évidente, le réseau ferroviaire français est propice à l’exploitation de services de transport ferroviaire à grande vitesse. Les métropoles et villes desservies par le réseau français des lignes à grande vitesse sont susceptibles d’assurer une viabilité économique satisfaisante à l’exploitation de services à grande vitesse. Les modalités d’exploitation de ces lignes par SNCF Voyageurs, qui privilégie le remplissage de ses trains à grande vitesse à leur fréquence, laisse à de nouveaux opérateurs des capacités disponibles pour exploiter de nouveaux services à grande vitesse. Toutefois, le coût d’entrée sur de tels services est très élevé. Ce sont essentiellement d’autres opérateurs historiques de pays voisins, exploitant déjà des services de transport ferroviaire à grande vitesse dans ces pays (Trenitalia en Italie et Renfe en Espagne), qui ont ainsi le plus de facilités pour lancer et opérer le développement de nouveaux services à grande vitesse en France.
En deuxième lieu, l’attractivité du système ferroviaire français pour l’exploitation de services librement organisés de transport domestique de voyageurs sur ligne classique, qui a suscité jusqu’à ce jour l’intérêt de quatre acteurs (FlixTrain, Railcoop, Le Train et Midnight Trains), peut être expliquée par la désaffection progressive de l’exploitation de tels services par l’opérateur historique, ces dernières années, en dépit du maintien d’une demande potentielle (arrêt total, fin 2020, du service librement organisé « Intercités 100 % Eco », arrêt progressif des services de trains de nuit, arrêt des services auto/train). Les plans d’affaires des nouveaux opérateurs ferroviaires désireux d’exploiter des services librement organisés sur le réseau des lignes classiques illustrent, au moins potentiellement, l’existence d’un marché « adressable » pour de tels services. Le développement, en France, de services librement organisés de covoiturage ou de transport longue distance par autocar vient, en outre, plutôt confirmer la possibilité de développer des services librement organisés de transport ferroviaire de voyageurs sur longue distance.
En troisième et dernier lieu, il semble également que des gisements de développement existent s’agissant des services conventionnés de transport de voyageurs. Cette analyse est, en particulier, partagée par les cinq régions qui se sont lancées ou se préparent à se lancer dans l’attribution concurrentielle de lots de services conventionnés de transport ferroviaire (Sud Provence-Alpes-Côte d’Azur, Hauts-de-France, Grand Est, Pays de la Loire et Île-de-France). Ces régions envisagent notamment le processus d’ouverture à la concurrence pour le marché des services conventionnés de transport ferroviaire de voyageurs comme un facteur de développement de l’offre. Par exemple, la région Pays de la Loire prévoit une hausse du trafic ferroviaire de 90 % d’ici 2030, sur l’ensemble des lots qu’elle souhaite soumettre à attribution concurrentielle par appels d’offres (services de Tram-train et Sud Loire). Les retours d’expérience issus des pays européens qui ont libéralisé depuis longtemps leurs services conventionnés de transport ferroviaire de voyageurs (Allemagne, Suède et Royaume-Uni, par exemple) illustrent bien le fait que le processus d’ouverture à la concurrence peut constituer un facteur clé de développement de l’offre.